Passe-passe herméneutique

À l’instar du test de Rorschach, les déclarations publiques du Pape donnent lieu à de surprenantes interprétations dans lesquelles l’objectivité tient moins de place que les fantasmes, ressentiments ou obsessions. Le lecteur idéologue y trouve ce qu’il y cherchait, après une scrutatio opérée en stricte diagonale, en se contentant de grappiller les quelques mots qui blessent. On obtient alors des perles d’exégèse, issues d’un art plus proche de la gymnastique acrobatique que de la science littéraire. Démonstration ci-dessous.

Extrait n°1
« Ce vœu, l’humanité le doit aux centaines de milliers de personnes, qui, sans aucune faute de leur part, et parfois pour le seul fait de leur nationalité ou de leur race, ont été vouées à la mort ou à une extermination progressive. »

Extrait n°2
« C’est aussi une invitation à savoir accueillir les légitimes diversités humaines, à la suite de Jésus venu rassembler les hommes de toute nation et de toute langue. »

Le résultat est consternant. Heureusement, nous avons perdu notre candeur d’antan. Candeur qui nous aurait forcément conduits à la stupéfaction devant ces commentateurs à la petite semaine des propos pontificaux qui, dans un cas, répètent en boucle leur sketch sur le « silence assourdissant »© de Pie XII pendant la seconde guerre mondiale, et dans l’autre, se gargarisent du bash que Benoît XVI a mis à Sarkozy, alors que l’intention du radio-message de Noël 1942 (extrait n°1) est – même à mots couverts – bien plus évidente que celle de l’Angelus du 22 août dernier (extrait n°2). Candeur qui nous aurait ensuite placés dans l’aporie face au volte-face subit de ceux qui, le lundi, se félicitent de voir le Pape et les évêques se faire les compagnons de route de Ségolène et de Martine, et le mardi, s’offusquent de l’ingérence desdits prélats dans des domaines à propos desquels ils n’ont pourtant pas voix au chapitre, selon une conception toute particulière de la liberté d’expression confondant laïcité avec dictature marxiste.

Ce sont les mêmes qui nous affirment, un jour, que Jésus avait des frères, et le lendemain, qu’il n’a en fait jamais existé. Les interventions télévisées d’Onfray, Mordillat et Prieur n’étant pas assez rares, elles finissent par laisser des séquelles…

Sinon, je voulais ajouter un truc, mais j’ai oublié quoi.