Le monde de la finance les qualifierait d’escrocs ; le monde de l’Art préfère parler de « plasticiens ». N’osant pas se prétendre peintres ou sculpteurs, ils se sont inventé une discipline que le béotien ordinaire assimilerait à un « foutage de gueule », si on lui apprenait que ça existe après son sixième pastis vespéral.
En mai 68, l’École des Beaux-Arts fut un haut lieu de production d’affiches engagées – et souvent excellentes, d’ailleurs – qui affirmaient « La chienlit c’est lui ! », ou encore « Presse – Ne pas avaler ». Dès lors, comment pourrait-elle renier cet héritage dans lequel expression artistique et contestation politique se rejoignent ? D’autant que, depuis près de trente ans, cette contestation est devenue institutionnelle et sponsorisée par l’État via le Ministère de la Culture, Radio-France ou Arte. Pourtant, l’ENSBA vient de réagir frileusement en faisant retirer de sa façade l’œuvre engagée d’une « artiste » chinoise qui consistait en deux grands panneaux sur lesquels était inscrit « travailler moins gagner plus ».
On appréciera le courage de Ko Siu Lan – Ko pour les intimes, j’imagine – qui n’a pas eu peur d’affronter le pouvoir sarkozyste avec un message aussi percutant et profond. Nul doute qu’elle manifesterait la même ironie envers le pouvoir en place si elle se trouvait sur la place Tien An Men. Et devant les éventuelles réticences des successeurs du Grand Timonier à exposer ses œuvres, il est certain qu’elle aurait, de la même façon, pris à témoin la Justice de son pays afin de faire triompher la liberté d’expression des intermittents de l’imposture. Quoi qu’il en soit, c’est ici, et grâce à l’intervention de Frédéric Mitterrand, notre Laurent de Médicis en scooter, qu’elle a pu permettre à l’Art avec un grand L de triompher sur l’obscurantisme et la tyrannie.
Pour fêter ça, je vous offre quelques opus conceptuels de mon cru, fruits de Photoshop et du travail des hommes. Conservez-les précieusement : ils vaudront une fortune lorsque je ne serai plus de ce monde.
Sinon, je voulais ajouter un truc, mais j’ai oublié quoi.