Solidaires ? Non : grégaires !

Je viens vous parler d’un temps que les moins de trente ans ne peuvent pas connaître. Le ministre de l’Éducation Nationale d’alors s’appelait Monory, mais il se fit voler la vedette par son délégué chargé de l’enseignement supérieur, Alain Devaquet. Ce dernier profita de son passage éclair au gouvernement pour énerver une bonne partie de la jeunesse – il eût été bien sot de s’en priver. Et c’est une bavure policière, rue Monsieur le Prince, qui mit fin aux jours d’un malchanceux allergique aux coups de matraque, ainsi qu’au projet de loi qui avait déclenché l’ire estudiantine.

Entretemps, les manifestations se multiplièrent, au rythme du désormais célèbre « … si tu savais, ta réforme, où on s’la met… ». Dans mon lycée, un quarteron d’élèves au charisme dévoyé nous répétait scrupuleusement les mots d’ordre que des adultes avaient mis dans les crânes. Une prof d’histoire-géo – physique ingrat et pull-over rouge – tenait lieu de commissaire politique. Ensemble, ils galvanisaient leurs camarades et les exhortaient à lutter contre le Mal, c’est-à-dire le RPR.

C’est à cette époque que j’ai compris l’efficacité de la démagogie sur les jeunes : il suffit de leur faire croire qu’ils sont intelligents. J’ai aussi gardé une grande défiance à l’égard de la foule : il n’y a rien de plus hypocritement totalitaire qu’un vote à main levée. Cette pseudo démocratie qui vire à la dictature, passé les 51%, je la hais d’une haine parfaite. La mentalité de garde rouge de mes condisciples de jadis, postés à l’entrée du lycée, et qui prétendaient contrôler nos allées et venues, m’a définitivement fâché avec tous ces mouvements qui revendiquent pour eux une liberté qu’ils dénient à ceux qui ne les suivent pas. En règle générale, communisme ou fascisme ne sont pas loin. Le jeune est un bon client pour ces choses-là…

Sinon, je voulais ajouter un truc, mais j’ai oublié quoi.