Étiquette : dérapage

Gros rouge (qui tâche)

8 avril 2013, 7 heures et des poussières : Jean-Louis Mélenchon, chef de file du Front de Gauche, vient d’apprendre par la radio la mort de Margaret Thatcher. Malgré une légère gueule de bois causée par les tequilas boum boum de la veille, il se sent soudain envahi par une sensation de bien-être assez inhabituelle chez lui. Lors, il se précipite sur son ordinateur, encore vêtu de son pyjama made in DPRK, dans un réflexe tout reptilien : il va s’exprimer sur Twitter afin de répandre pour ses 137.807 abonnés une parole forte, solennelle, digne d’un ex-candidat à la présidence de la République. Le lettré qu’il est cisèle un message – presque un haiku – qui sera posté afin de satisfaire ses followers avides de vérité. À 7h 33, le verbe se fait tweet : « Margaret Tchatcher va découvrir en enfer ce qu’elle a fait aux mineurs. »

Beaucoup pensaient que Jean-Claude Mélenchon ne croyait ni à Dieu ni à Diable : erreur ! Il a, à plusieurs reprises, professé sa foi envers le second. On constate que sa religion à lui comporte, elle aussi, une dimension sotériologique, avec toutefois un accent franchement mis sur la damnation. Pour ce qui concerne le salut, son espérance semble se limiter à l’avènement du paradis socialiste à la place de cette république qui tolère encore les agissements des bigots réactionnaires.

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Des nouvelles pas très Frêche

Georges Frêche n’est plus. Vous devez être au courant, j’imagine. Je mentirais en affirmant que sa disparition m’a bouleversé. En cela, je me rapproche de Marine Aubry, une fois n’est pas coutume. Toutefois, le don que possédait cet homme truculent pour indigner les tartuffes qui dirigent son parti depuis le QG, rue de Solférino, lui avait valu une certaine sympathie de ma part. Ses « dérapages » – selon la terminologie aujourd’hui consacrée – faisaient tâche au sein d’un bord politique qui se drape d’un angélisme de façade. D’un autre côté, ces mêmes dérapages arrangeaient bien ceux de ses camarades qui tentaient de se débarrasser de ce trublion à la nuque raide et au verbe haut – et pas toujours très fin.

Un de ses derniers faits d’armes fut l’installation, dans sa ville de Montpellier, de ces statues – assez moches – de personnages politiques ayant marqué le XXème siècle. La présence de Lénine et celle à venir de Mao parmi ce panthéon firent grincer les dents de pas mal de gens qui, à quelques dizaines de millions de morts près, savent à quel point le bilan du communisme est « globalement positif ». Si encore lesdites statues avaient la fière allure de celles produites dans le bel esprit réaliste-socialiste, on aurait pu admettre…

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Liberté conditionnelle

« Que chacun prenne ses responsabilités et tire les conséquences ! » : ce genre de formule surgelée, vous l’entendez répéter chaque jour, aussi bien par un premier secrétaire du Parti Socialiste à court d’arguments que par un footballeur de l’équipe de France à court de neurones. Il faut dire que la langue de bois a des vertus que n’ont pas les autres idiomes internationaux – grec ancien, latin, français, anglais – et dont la première est la facilité avec laquelle on s’y forme. Elle offre un autre intérêt appréciable en livrant des phrases prêtes à l’emploi, ce qui dispense donc du périlleux exercice de composition linguistique que nombre de nos contemporains transforment immanquablement en massacre grammatical. C’est ce qu’appréciera tel sportif de haut niveau, déjà très occupé avec ses interminables séances de coups francs – ou de bimbo siliconée – à tirer.

Mais si la langue de bois s’est autant répandue à travers les médias, c’est peut-être aussi parce qu’elle permet à celui qui l’emploie de ne pas sortir des limites du politiquement-correct : depuis une trentaine d’années, l’espace de liberté de parole s’est singulièrement réduit, permettant à une ribambelle de moucherons-citoyens de restaurer l’esprit de 1793. L’usage de cette langue convenable – que l’on rapproche parfois de la novlangue orwellienne – apporte une sécurité quasi absolue. Puisqu’on arrive désormais à parler sans rien dire, plus aucun risque ! Ni d’être incompris, puisque ces arrangements de mots sont des façades cachant du vide, ni d’être compris, et c’est un peu ça le but. L’important, bien sûr, étant de pouvoir répondre dans le micro sans crainte d’y laisser sa peau, exercice ô combien difficile à notre époque de vertu impitoyable.

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