Étiquette : populisme

Démophobie

Des barricades dressées, des voitures incendiées, des pavés qui volent : c’est comme ça qu’on aime Paris. Mais Paris en mai 68. Cinquante ans plus tard, les mêmes qui jettent un œil humide de nostalgie sur les émeutes du Quartier Latin trouvent nettement moins sympathiques les manifestations de « gilets jaunes » qui se multiplient depuis plusieurs semaines. Car depuis qu’ils sont devenus des notables, les anciens leaders soixante-huitards ont perdu le goût de l’agitation politique. Pas de cette agitation subventionnée dans quelques théâtres élitistes mais de celle, moins domestiquée, provoquée par cette plèbe qui ne fréquente pas plus Jeff Koons que La Princesse de Clèves.

Ce mouvement leur paraît d’autant moins estimable qu’il ne se berce pas d’altruistes utopies comme celles de leur jeunesse qui les poussaient à s’opposer à la guerre du Vietnam et à réclamer la mixité dans les dortoirs des cités universitaires : les gilets jaunes se battent seulement pour pouvoir payer de quoi se nourrir, se loger et se déplacer, en gros survivre jusqu’au 30 du mois. Ces considérations triviales n’émouvront jamais nos intellectuels droit-de-l’hommistes qui ne s’intéressent au peuple que tant qu’il n’est pas autochtone et surtout pas trop réel.

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De l’autre côté du miroir

Si la Curie romaine a finalement arrêté de mettre à jour son Index, Jean-Luc Mélenchon semble décidé à établir le sien, destiné à condamner toute publication qui tenterait de mitiger le bilan globalement positif de ses modèles politiques. Dans le collimateur du camarade, le ci-devant Lorant Deutsch, auteur de best-sellers sur l’Histoire de France, devenu la bête noire du Parti de Gauche depuis qu’il s’est permis d’écorner l’image d’une Révolution Française qui n’aurait fait tomber que quelques têtes par inadvertance. S’il n’y avait de coupables que lui et son éditeur, cela pourrait encore passer, mais le scandale est parfait dès lors qu’il trouve comme complices le service public télévisuel ou la municipalité de Paris pour faire la réclame de ses ouvrages trop nuancés quant aux bienfaits de la bascule à Charlot.

Comment un régime socialiste qui se respecte peut-il ainsi servir de tête de gondole à un écrivain que le citoyen Corbière – le bras gauche de Mélenchon – accuse de n’être qu’un « populiste chrétien » , autrement dit un agent de l’obscurantisme ? Les hérauts du populisme antichrétien ne sauraient voir surgir la Réaction sans réagir aussi sec. Ne perdant pas les bonnes vieilles habitudes, ils ont commencé par dresser une liste, non exhaustive bien sûr. On ne demande pas forcément l’embastillement des Lorant Deutsch, Franck Ferrand, Jean Sévillia, Stéphane Bern – puisqu’on n’est plus sous l’Ancien Régime et pas encore en dictature communiste – mais on sollicite avec insistance la diffusion de documentaires plus socialement corrects, comme le ferait un McCarthy converti au marxisme-mélenchonisme.

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Des nouvelles pas très Frêche

Georges Frêche n’est plus. Vous devez être au courant, j’imagine. Je mentirais en affirmant que sa disparition m’a bouleversé. En cela, je me rapproche de Marine Aubry, une fois n’est pas coutume. Toutefois, le don que possédait cet homme truculent pour indigner les tartuffes qui dirigent son parti depuis le QG, rue de Solférino, lui avait valu une certaine sympathie de ma part. Ses « dérapages » – selon la terminologie aujourd’hui consacrée – faisaient tâche au sein d’un bord politique qui se drape d’un angélisme de façade. D’un autre côté, ces mêmes dérapages arrangeaient bien ceux de ses camarades qui tentaient de se débarrasser de ce trublion à la nuque raide et au verbe haut – et pas toujours très fin.

Un de ses derniers faits d’armes fut l’installation, dans sa ville de Montpellier, de ces statues – assez moches – de personnages politiques ayant marqué le XXème siècle. La présence de Lénine et celle à venir de Mao parmi ce panthéon firent grincer les dents de pas mal de gens qui, à quelques dizaines de millions de morts près, savent à quel point le bilan du communisme est « globalement positif ». Si encore lesdites statues avaient la fière allure de celles produites dans le bel esprit réaliste-socialiste, on aurait pu admettre…

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